Portraits d'ardéchois

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Léon SOULERIN


1844 - 1893


Ingénieur, inventeur, entrepreneur

D'après le texte et avec l'autorisation de Jean-Marc Gardès

Si c'est bien à l'ingénieur américain d'origine écossaise Graham Bell que l'on doit l'invention du téléphone outre-atlantique en 1876, c'est encore un Ardéchois qui ramena cette invention étrangère en France pour la développer (1).

Le téléphone Bell fut en effet introduit en France en 1879 par l'ingénieur Léon Soulerin, originaire de Chassiers en Ardèche.

Léon Soulerin est né le 8 septembre 1844, à Chassiers, près de Largentière. D'abord géomètre en Haute-Savoie, il travailla ensuite comme ingénieur en Amérique du Nord, de 1867 à 1879. C'est à ce titre qu'il prit part à la construction du chemin de fer de Milwaukee Manitowoc et Gree-Bay.

Concessionnaire du premier réseau téléphonique à Paris.

Un article du Figaro daté du 21 décembre 1884 nous apprend dans quelles circonstances M. Soulerin installa la première ligne de téléphone dans la capitale en 1878 :

Le téléphone qui alors allait d'une chambre à l'autre dans un appartement, ne pouvait pas grand chose ; il fallait le faire fonctionner à une longue distance pour convaincre les récalcitrants. Le Ministre ne permettait point la pose d'un câble sur la voie publique ; la question était à l'étude, comme on dit. On sait ce que cela signifie le plus souvent, n'est-il pas vrai ? Une question à l'étude, c'est quatre vingt dix neuf fois sur cent un enterrement de première classe pour l'invention qui en est l'objet. Le téléphone Bell, appareil américain, importé par un Français, M. Soulerin, était moins appuyé en haut lieu que ses concurrents. Poussé à bout, cet homme ingénieux fit un véritable coup d'État...

Dans la nuit, sans permission préalable, il fit établir un téléphone, partant de la halle aux blés et aboutissant dans la haute rue Richelieu, et, par une ironie audacieuse..., il attacha le poteau conducteur sur l'ancien hôtel des Postes, monument officiel...
Les gardiens de la paix, en voyant les ouvriers affairés sur la toiture de M. Cochery, ne se doutaient de rien ; au petit jour, le téléphone clandestin fonctionnait et M. Cochery fut invité à venir le voir.

« Savez-vous que vous venez de commettre un délit ? » s'écria M. Cochery, « et que vous pourriez être arrêté pour avoir établi une ligne télégraphique en dehors de l'État ? ». « Ce soir, j'aurai fait enlever votre téléphone ! »

Mais la première colère passée, M. Cochery se ravisa. Non seulement il ne fit pas enlever le premier fil, mais il existe encore aujourd'hui (en 1884)... 

Inventeur de systèmes de frein pour les chemins de fer

Léon Soulerin s'est également intéressé à l'étude des freins dits "continus", appliqués aux tramways, locomotives et autres wagons de chemin de fer. Toutes les voitures et fourgons du Petit Anjou étaient équipées du frein à vide Soulerin. Entreprenant, Louis Soulerin crée la "Société anonyme des freins Soulerin" qui sera présente sur l'exposition universelle de Paris en 1900.

Léon Soulerin est mort.

Allô !

Contrairement à ce que l'on peut croire, le mot "Allô" serait bien d'origine française, et non anglaise, comme le rapporte un article reproduit dans le journal illustré 'Nos Loisirs" daté du 1er juillet 1906. C'était en 1880, Léon Soulerin venait d'importer d'Amérique le téléphoen Bell. Il avait installé plusieurs postes reliant ses bureaux à ceux de son imprimerie, pour servir d'expérience.

" On employait au début le mot "Allons !" qui, accentué d'une certaine façon, et répété signifie "Hâtez-vous donc !". C'était long, et le son nasal de "allons", peu agréable. On supprima bientôt les deux dernières lettres : il restait ainsi "allo" qui ne signifiait plus rien, mais qui sonnait clairement et se transmettait nettement. Depuis il a fait le tour du continent…"

 

- N.B. : Avant lui, on peut citer Marc Seguin qui reprit, en France, l 'invention du pont suspendu avec des chaînes en fer forgé de l'américain James Filey. Après lui, Joseph Besset, le charron de Vanosc, qui acheta la licence américaine Gar Wood pour construire son premier autocar Isobloc en 1938...

 

Sources

- "Envol", mensuel de la Fédération des Œuvres Laïques de l'Ardèche, n° 609, avril 2011,
Cahiers de l'association "Mémoire d'Ardèche et Temps présent" n° 86 et 95.(Jean-Marc Gardès)

- Sur ces questions d'innovation à partir d'une première invention, voir : Le Génie de l'Ardèche, Jean-Marc GARDES – Annie SORREL, F.O.L.-Éditions, Privas, 2007.