Samuel Hahnemann est originaire de Meissen en Saxe, jolie petite ville située sur l'Elbe. C'est une des plus anciennes citées de la Saxe ; elle devint sa première capitale quand l'Empereur Sigismund confia le duché de Saxe à Frédéric le belliqueux. Durant la première moitié du XVIIIème siècle, la porcelaine est considérée comme la plus grande richesse du pays dont seule la Saxe détient le secret de fabrication d'une pâte dure et transparente pouvant concurrencer celle de Chine. Le père de Samuel travaille à la manufacture, il est décorateur de porcelaine.
A sa naissance le 10 avril 1755, le jeune Samuel Il est le troisième d'une fratrie de quatre enfants ; son père, Gottfried, était peintre sur porcelaine.
Il est destiné à devenir également peintre ou ce qui parait préférable à son père, courtier en porcelaine. A ce métier des gens se sont fort enrichis.
Mais survient la guerre de sept ans, Frédéric de Prusse rentre en Saxe, pille la manufacture de Meissen; ainsi l'espoir du père de Samuel concernant l'avenir de son fils dans le commerce de la porcelaine est rapidement ruiné.
Délaissant le commerce, l'enfant petit, chétif, malingre même, s'impose à l'école une discipline de travail pour obtenir le maximum de rendement intellectuel. L'étude seule l'intéresse. Le roi de Saxe accorda une bourse pour les qualités d'assiduité et d'intelligence du jeune Samuel. Ce fut un grand honneur pour la famille.
Il entra donc à l'école noble de Saint Afra où il développe son talent de linguiste. A sa sortie de l'école, il doit selon l'usage, faire un discours en latin, il choisit pour thème: "La curieuse construction de la main," où il indique l'importance spirituelle de la main, prolongement de la pensée et intermédiaire entre la pensée et l'acte.
Leipzig
Il décide ensuite de poursuivre ses études à Leipzig. Là c'est la grande aventure qui l'attend. Il part sans argent et ses parents ne peuvent cacher leurs larmes de voir partir leur unique fils qui a choisi de trouver son bonheur dans un monde lointain et inexploré dont il pressentait les richesses et qui prenait sa synthèse dans le mot: "SAVOIR". A Leipzig, il organisa économiquement son existence pour pouvoir subsister avec le pécule que lui avait remis son père ; mais le problème qui le préoccupait était de déterminer la carrière qu'il allait entreprendre.
Vienne
Il avait un goût passionné pour la recherche scientifique. Il voyait dans la médecine un univers caché où il y avait une recherche à faire, une lutte à engager contre le mystère, une bataille contre la mort. Après deux années passées à Leipzig dans les salles de lecture, les bibliothèques, il se rendit à Vienne pour tenter d'y apprendre la pratique médicale. En arrivant à Vienne, Samuel voulut tout voir, tout connaître de cet enchantement, mais les bastringues et les beuveries l'ont vite lassé et écœuré. Il voulut s'enivrer de ce qu'il ne connaissait pas. Puis un beau jour, il se trouva au milieu des salles de l'hôpital de la Miséricorde, but de son voyage. Il vint à Vienne pour sortir de la théorie et se lancer dans la pratique de l'art de soigner. Il est devant la maladie, vaincre la douleur l'attire. Il veut connaître le degré des fièvres, se rendre compte des réactions aux thérapeutiques.
Après de nombreux jours de labeur acharné, harassé et dégoûté de l'insuccès de ses efforts, il doute de soi, de la valeur des remèdes et des théories enseignées. La maladie résiste.
Il décide alors de se rendre auprès du religieux qui dirige l'apothicairerie mais celui-ci lui dit qu'il n'y a pas de nouveaux remèdes et qu' "il n'y aura pas avec d'autres de meilleurs résultats parce qu'un remède dépend d'une doctrine et que nous n'avons aucune doctrine. On emploie des produits sans les connaître".
Mais après les dures années de Leipzig où il avait travaillé presque nuit et jour, après Vienne où il avait connu la tentation, il obtient finalement son diplôme à Erlangen, en 1779. Le baron Samuel de Bruckenthal, gouverneur de Transylvanie, prit Hahnemann comme médecin personnel pendant 21 mois.
En 1782, à l'âge de 27 ans, Hahnemann épousa Johanna Henriette Kuchler, la fille d'un apothicaire. Ils eurent une nombreuse famille de 11 enfants - 9 filles et 2 garçons.
Il s'installe à Leipzig en 1789. En 1790, il renonça complètement à l'exercice de la médecine, et se consacre à l'écriture et à des traductions.
Découverte de l'homéopathie
Son éditeur lui propose la traduction - il parlait sept langues - d'un ouvrage récent de William Cullen, médecin écossais, sur le quinquina du Pérou (Traité des matières médicales). Alors qu'il était en train de traduire ce livre, se trouvant en contradiction avec l'auteur qui préconisait cette drogue, il eut l'idée pour bien juger de la valeur de ce médicament, d'en contrôler les effets sur lui-même. Sous l'influence du quinquina, l'homme en bonne santé présente des symptômes analogues à ceux de la "fièvre intermittente." Il répète plusieurs fois l'expérience et dès qu'il absorbe du quinquina son état fébrile se déclenche et disparaît dès qu'il cesse d'en prendre.
Premier principe de l'homéopathie
Il rechercha alors, aussi loin qu'il pût dans ses lectures et se souvint de la loi de similitude qu'avait énoncé Hippocrate " Similia similibus curantur " :"Les semblables sont guéris par les semblables, ce qui produit la strangurie qui n'est pas, enlève la strangurie qui est ."
Cette loi de similitude Hahnemann énonça à son tour qu'elle pouvait exister dans la maladie et sa thérapeutique: "Pour guérir une maladie, il faut administrer un remède qui donnerait au malade, s'il était bien portant, la maladie dont il souffre." Le premier principe de base de l'homéopathie stipule que les maladies se guérissent par les drogues qui donnent les mêmes symptômes que la maladie elle-même (loi ou principe de similitude).
Selon HAHNEMANN les drogues exalteraient " la force vitale" contre des effets analogues : les vaccins préventifs fabriqués depuis lors n' opèrent pas autrement.
L'homéopathie était créée avec ces trois principes
- Similitude.
- Expérimentation sur l'homme sain.
- Dose infinitésimale.
Le principe de dilution repose sur cette idée que les médicaments produisant des réactions analogues à celles de la maladie qu'il faut combattre, il est nécessaire de ne recourir qu'à des doses infimes afin de ne pas aggraver ce symptôme.
C'est alors que les tracasseries morales et physiques commencent. Sa femme Henriette-Léopoldine ne veut pas croire en sa découverte, un jour qu'un de leurs enfants est malade sans gravité, Hahnemann cherche à le soigner avec sa méthode encore balbutiante et ne réussit pas aussi vite qu'il l'espérait. Sa femme s'insurge, hurle sur le pas de la porte, ameute les voisins : " il me faut un médecin, Samuel n'est pas un médecin." A l'extérieur, la bataille fait rage, ses amis le fuient. Par contre les grands l'affectionnent. Le Duc de Saxe Gotha met à sa disposition son château de chasse pour lui permettre de créer un hôpital homéopathique.
Ainsi Hahnemann appelé par les uns, repoussé par les autres, va de ville en ville, traînant sur les routes d'Allemagne sa famille harassée. Il arrive enfin à Torgau où il trouvera un peu de tranquillité pour continuer ses observations et publier ses notes : un traité d'hygiène "L'ami de la Santé" et ce qu'il convient d'appeler la bible homéopathique: "L'Organon", nous sommes en 1810.
Cette dernière publication déchaîne à nouveau la tempête mais grossit aussi le nombre des fidèles. Du coup lui-même demande et obtient de la Faculté de Leipzig le droit de donner une conférence. Une foule nombreuse de médecins et d'étudiants y assistent. La médecine officielle s'insurge. On publie des rapports, et c'est alors une une sarabande contre Hahnemann qui, pliant sous le poids n'a plus qu'une ressource: se réfugier auprès du Duc d'Anhalt-Köthen qui lui demande de devenir son médecin particulier.
On continue cependant à venir de loin pour le consulter; ainsi il guérit avec retentissement le conseiller général de Berlin Baumgartner.
Le second principe
Le second principe de l'homéopathie repose sur le fait que le médicament agit par sa nature et non par la quantité ingérée.
Hahnemann a 76 ans; il met au point ses notes pour que dit-il " ce que j'ai fait ne soit pas perdu pour le monde." Mais il ne veut plus combattre. Des chagrins l'assaillent dans sa famille même : successivement sa femme et plusieurs de ses enfants meurent. Le vieillard reste esseulé en tête-à-tête avec lui-même, soignant toujours, rédigeant des articles, précisant la théorie de la petite dose, avec la crainte anxieuse que la mort arrive et qu'on enterre avec lui l'œuvre née de son patient labeur.
En 1821, Hahnemann avait expérimenté soixante-six remèdes et publié sa Matière Médicale Pure en six volumes.
En 1831, le Choléra gagna l'Europe Centrale. Hahnemann publia des articles sur le traitement homéopathique de la maladie, et fut à l'origine du déploiement de l'homéopathie dont le taux de guérison était de 96%, comparé au taux de 41% de l'allopathie.
Rencontre avec Mélanie d'Hervilly
C'est alors que le prodige a lieu. Il est curieux de constater que ce ne sont ni les fils, ni les gendres médecins d'Hahnemann qui étaient ses continuateurs naturels, qui furent chargés par le destin de prendre en main l'œuvre de leur père et de la propager. C'est à une française: Mélanie d'Hervilly que sera dévolu ce rôle. C'est une jeune fille qui a subi comme la jeunesse de son temps les perturbations générales. En 1835, Mélanie est seule, gagnant sa vie avec sa peinture. Elle est atteinte de la terrible phtisie ; autour d'elle la médecine est impuissante à traiter les cas comme le sien. C'est à ce moment que pour la première fois, Mélanie entend parler de l'homéopathie et de Samuel Hahnemann son fondateur. En France l'homéopathie avait été apportée par un Italien, le Comte Des Guidi. Pensant qu'il vaut mieux s'adresser au Bon Dieu qu'à ses Saints, Mélanie après avoir affirmé que l'homéopathie ne la guérira pas mieux que l'allopathie, décide d'aller consulter à Köthen. Elle s'embarque donc dans une diligence pensant consulter Hahnemann puis gagner au plus vite par la route - de l'Elbe, Dresde, but de son voyage et lieu de son séjour.
"Je peux vous guérir" lui dit Hahnemann . Avec des yeux pleins de confiance. Mélanie hésita d'abord puis s'engagea à essayer le traitement préconisé. Alors vint à l'idée de la jeune fille d'aider Hahnemann à divulguer sa doctrine : " Permettez-moi, lui dit-elle, d'être votre fille spirituelle, j'ai la même foi que vous." C'est ainsi que leur union fut projetée. Il y eut un fameux branle-bas dans la maison de Köthen quand le vieillard apprit à ses deux filles que non content d'épouser Mélanie, près de 40 ans plus jeune que lui, il allait partir avec elle pour Paris. Cependant pour dissiper toute critique et prouver son désintéressement, la jeune femme exigea que tout l'avoir du médecin soit distribué entre ses enfants avant, leur départ.
Quand ils débarquèrent à Paris, au 26, de la rue des Saints-Pères, en juin 1835, ce fut la ruée des malades, des admirateurs et des médecins voulant s'instruire à ce nouvel art; l'appartement fut rapidement insuffisant.
Après un labeur sans repos, une vaillance sans pareille, dirigeant les confrères homéopathes, recevant, pansant, soignant des malades de tous les pays, nous voici dans les derniers jours de juin 1843. Depuis quelques temps Hahnemann est malade, il a interrompu ses consultations en proie à un catarrhe suffoquant depuis de nombreux mois. Il est alité, puis c'est la fin au cours de son dernier soupir il put prononcer ces mots " ... In altem aber liebe. Amare et amari... Confiance et paix ".
Pour exécuter le désir de Samuel Hahnemann d'être enterré pauvrement et sans cortège, Mélanie d'Hervilly ne prévint de sa mort survenue le 2 juillet 1843, que sa famille proche. Il est enterré à Paris au cimetière du Père Lachaise.
En 1850, sept ans après sa mort, la ville de Leipzig d'où il avait été chassé, lui éleva une statue.
"Un médecin doit être un ami de l'ordre, un homme d'amour et de charité." S. Hahnemann