Antoine-Augustin PARMENTIER

1737-1813

Pharmacien des Armées, vulgarisateur de la pomme de terre

Le pharmacien militaire Antoine-Augustin Parmentier surtout connu pour avoir vulgarisé en France la consommation de la pomme de terre devrait l'être également pour ses recherches sur l'amélioration et la conservation des aliments.

La Pomme de terre: Solanum tuberosum escculentum.Originaire des Andes dans la région du lac Titicaca, les Incas la cultivaient sous le nom de "papa", près de 1.000 ans avant J.C.
La pénétration jusqu'en Europe se fait vers 1570 par les "conquistadores" espagnols qui transportent les premiers tubercules en Espagne (en Andalousie elle s'appelle encore papa) et en Irlande.
D'Espagne, Philippe II en envoie à Rome au pape Pie IV, le pape en envoya au gouverneur de Mons en Belgique qui en en fait parvenir en Autriche. De là, la pomme de terre se propagea en Allemagne, en Suisse puis dans l'Est de la France.
En France, les premières plantations de pommes de terre "les truffoles" sont localisées en Ardèche au milieu du 16e siècle, officiellement c'est Olivier de Serres qui, en 1600, les cultive pour la première fois en Vivarais.
Son emploi dans l'alimentation humaine, en France, date de 1616 environ, mais rencontre de vives résistances car des plantes voisines ont la réputation de contenir des substances pouvant entraîner des troubles.

Parmentier est né à Montdidier, dans la Somme, le 17 août 1737, paroisse du Saint Sépulcre (une plaque est apposée à l'emplacement de sa maison natale, dans la rue qui porte son nom). Après un court stage à la pharmacie Lombard, il devient élève à l'âge de 15 ans à la pharmacie Frison à Montdidier. A 18 ans il se rend à Paris poursuivre son apprentissage.

A l'âge de 20 ans il participe à la Guerre de Sept Ans (1756-1763) comme apothicaire sous-aide aux armées qui opéraient en Prusse contre l'Empereur Frédéric II. Blessé et fait prisonnier, il passe une partie de son temps à herboriser dans le Hanovre. C'est ainsi que Antoine-Augustin Parmentier découvre les vertus nutritives d'une solanacée, la pomme de terre, pendant sa captivité en Prusse.

A son retour à Paris en 1763, il reprend ses études. Le 16 octobre 1766, il obtient le titre d'Apothicaire gagnant maîtrise à l'Hôtel Royal des Invalides.

Les premiers travaux de Parmentier

En 1771, dans la pharmacie de l'Hôpital des Invalides à Paris, Parmentier commence des recherches sur les cultures végétales alimentaires, sur la chimie alimentaire et en particulier sur la composition chimique des pommes de terre.

En 1772, il est Apothicaire-major des Armées Françaises. L' Académie de Besançon ouvre en 1769 un concours sur le thème des végétaux de remplacement dans l'alimentation humaine. Parmentier en est le lauréat avec le premier prix qu'il publie en 1773 sous le titre: l' pommes de terre"Examen chimique de la pomme de terre." Parmentier propose dans son mémoire la généralisation de la culture de la pomme de terre, qu'il a connue dans le Hanovre afin de permettre de juguler les famines.

En 1781, il reprend et complète une thèse sous le titre "Recherches sur les végétaux nourrissants qui, dans les temps de disette, peuvent remplacer les aliments ordinaires, avec de nouvelles observations sur la culture des pommes de terre".

La carrière militaire de Parmentier

En tant que militaire, nous avons vu qu'il a déjà participé à la Guerre de Sept Ans (1756-1763), pendant laquelle il a été fait prisonnier. Plus tard, il est engagé à la Guerre de l'Indépendance Américaine (1775-1783), de 1779 à 1781 il participe en Amérique à la guerre contre l'Angleterre, avec plus de 30.000 autres français. Tout en restant dans l'armée, comme Administrateur des Hôpitaux et Inspecteur général du Service de santé des Armées Impériales sous Napoléon Ier, Parmentier joua un grand rôle dans l'alimentation de la nation au cours des guerres de la Révolution et surtout au cours du blocus continental.
En outre, il participe activement, de 1805 à 1813, aux campagnes de vaccination contre la variole entreprise dès 1799 avec l'appui du général Bonaparte, et avec les médecins Pinel et Guillotin.

Campagnes en faveur de la pomme de terre

fleurs de pomme de terre

C'est par une ruse qu'il parviendra à s'imposer

- En 1785, Parmentier fait découvrir et apprécier à Louis XVI le tubercule en lui apportant des tiges fleuries que le roi porta à la boutonnière et la reine dans sa coiffure. Tous deux demandèrent à goûter les "parmentières" comme on appelait alors les pommes de terre.

- La même année, pour mener à bien ses essais Parmentier obtient de Louis XVI l'autorisation d'entreprendre sa célèbre expérience: il fait planter 54 arpents (environ 2 hectares) de champs de pommes de terre sur un champ de manoeuvres militaires aux environs de Paris, plaine des Sablons à Neuilly-sur-Seine. On dit qu'il aurait fait garder l'emplacement, de jour seulement, par les soldats du roi, afin d' intriguer la population. La rumeur court que si l'armée est là pour en interdire l'accès c'est que ce qui y pousse doit avoir de la valeur. En l'absence de garde du terrain la nuit les précieux tubercules sont dérobés, ce qui en assure alors la publicité. Cette initiative contribua à introduire la pomme de terre dans la société française, mais la renommée viendra plus tard.
Les instituteurs et les prêtres furent parmi les premiers à cultiver la pomme de terre dans leurs jardins. Avec la famine de 1789, sa culture se répandit pour devenir un produit de base de notre alimentation vers 1840.

Dès lors Parmentier se spécialise de plus en plus dans les problèmes alimentaires. Il sélectionne nombre de végétaux utiles et rédige au cours de sa carrière près d'une centaine de mémoires et traités divers.

- En 1791 Parmentier et Deyeux publièrent un mémoire sur l'étude clinique des altérations que le sang éprouve dans les maladies putrides et dans le scorbut. Les résultats étaient encore minces mais une nouvelle méthode de recherches se trouvait ainsi établie.

- Parmentier et Cadet de Vaux (ancien pharmacien des Invalides), essayèrent dès 1772 d'améliorer la qualité du pain distribué dans les hôpitaux et les prisons et d' imaginer des méthodes nouvelles de panification. La technique de conservation alimentaire comprenait le pain biscuité et le pain de pommes de terre mis au point par Parmentier en 1799. Il améliora la technique de la fabrication du pain et du biscuit de mer (conservé en boites étanches).

- Il réforme la meunerie et la boulangerie (Parmentier est le fondateur d'une école de boulangerie sur laquelle il a écrit plusieurs traités).

- Après 1793 c'est Parmentier en particulier qui eut l'idée de remédier à la pénurie de sucre de canne et indiqua des techniques d'extraction du sucre à partir de végétaux européens. Il suggère de remplacer le sucre par le sirop de raisins ou d'autres fruits sucrés.
Le Blocus continental obligea le remplacement du sucre de canne par le sucre de betterave dont la première raffinerie fut mise en service par Delessert en 1801. Le sucre de raisin fut découvert dans le vin muscat par Proust en 1802. La technique de son extraction fut étudiée par Chaptal, Vauquelin, Parmentier et Proust en 1810.
- Il étudie également l'utilisation des produits laitiers, la conservation des vins et des farines;
- Il envisage également la conservation par le froid;
- Il préconise la réfrigération des viandes;
- Il entreprend également des travaux sur l'opium et l'ergot de seigle.
- La technique des conserves alimentaires par ébullition (Apert, 1810) fut définitivement mise au point et ne cessa de progresser.

L'Enseignement de la Pharmacie

C'est l'époque Parmentieroù les apothicaires deviennent des pharmaciens et parallèlement à la médecine d'hôpital se crée une pharmacie hospitalière qui suit l'évolution générale de la médecine.

Parmentier fut démonstrateur pour la botanique et l'histoire naturelle au Collège de Pharmacie créé en 1777. Ce Collège fut supprimé en 1793, les pharmaciens de Paris se constituèrent alors en une Société libre des Pharmaciens de Paris (30 ventose an IV soit 21 mars 1796 qui ouvrit des cours en l'an V (1797). La même année, elle était reconnue officiellement par le Directoire comme école gratuite de Pharmacie.

L'apothicairerie générale installée le 18 Prairial an III (6 juin 1795), fut remplacée par la Pharmacie centrale des Hospices le 22 Brumaire an V (12 novembre 1796).

En 1803 est créée l' école de Pharmacie de Paris (loi du 21 germinal an XI). L'internat en pharmacie fut créé plus tard en 1815.
Le premier travail des pharmaciens fut la refonte du Codex. La Pharmacopée des Hospices , rédigée par Parmentier et revue par l'école de Médecine, parut avec l'appui du Conseil Général des Hospices en 1803. Elle fut rééditée sous le nom de Code Pharmaceutique en 1803, 1807, 1811 et sous le nom de Codex médicamentarius sive Pharmacopea gallica en 1818.

Parmentier créa aussi la Société de Pharmacie de Paris et fut associé à diverses institutions nationales où sa contribution fut très remarquée:
- Adjoint au Conseil de Santé en 1782.
- Membre de l'Académie des Sciences en 1795.
- Il est nommé premier pharmacien des armées en 1800.
- L'Empereur Napoléon 1er lui remit la Légion d'honneur.
- Inspecteur général du Service de Santé de 1805 à 1813.
Au moment de la levée en masse Antoine-Augustin Parmentier et Pierre Bayen illustraient la pharmacie.

La situation acquise par Parmentier sous NapoléonIer illustre assez bien le ralliement d'une partie du monde médical à la politique du Premier Empire: Napoléon leur paraît seul capable de mettre en pratique les idées des Lumières. Parmentier était de ceux qui préféraient prévenir que guérir. Non convaincu de l'efficacité réelle de la médecine, il est donc partisan de l'intervention autoritaire de l'état, seul capable, selon lui, d'imposer des mesures alimentaires et médicales appropriées. Parmentier fait partie de ces hommes qui, du milieu du XVIIIesiècle au milieu du siècle suivant, ont permis à la médecine préventive d'arriver, à force d' innovations, à agir efficacement sur l'espérance de vie moyenne.

Parmentier est mort à Paris le 17 décembre 1813, il est enterré au cimetière du Père Lachaise (Division 39, place 56) où il est encore honoré par certaines sociétés de pharmaciens.

Son rôle dans l'Histoire dépasse l'anecdote, les travaux de ce scientifique éclairé du XVIIIe siècle sont tous aussi remarquables par leur qualité, leur ampleur et les nombreux domaines étudiés.
Il n'a jamais cessé d'oeuvrer pour que les acquis de la science, en plein progrès, se traduisent dans la vie quotidienne. Il pensait que le meilleur moyen de lutter contre les maladies est de donner accès à une nourriture de qualité et à une hygiène améliorée.
Ce fut un des bienfaiteurs de l'Humanité.