Il est né en 1493 à Einsiedeln (Suisse), dans l'ambiance de pauvreté rustique et de fierté populaire qui baignait alors les premiers cantons helvétiques qui lui inspira sans doute son célèbre principe:
"N'est pas sujet d'autrui qui peut être son propre maître." (Ne sois pas un autre si tu peux être toi-même.)
émasculé dans l'enfance par un militaire, il était atteint de disgrâces physiques par lesquelles on a voulu expliquer son instabilité, ses penchants alcooliques et son irritabilité.
"La nature ne m'a pas tissé avec beaucoup de subtilité. Et il n'est pas dans l'habitude de mon pays d'utiliser des fils de soie. Nous n'avons pas été élevé avec des figues, de l'hydromel, du pain de froment; mais avec du fromage, du lait et du pain d'avoine: ce n'est pas avec cela que l'ont fait des jeunes gens subtils. Et ce que nous avons reçu étant jeunes, nous demeure attaché jusqu'à la fin de nos jours. Comparés aux personnes délicates, propres comme des chats et supérieurement raffinées, nous paraissons grossiers. Et nous ne nous entendons pas bien, nous qui avons grandi parmi les pommes de pin, avec ceux qui ont été élevés dans des habits de soie et par des mains de femme." Paracelse
Privé très jeune des soins de sa mère, Paracelse fut initié par son père aux joies et aux déboires du médecin praticien.
Au Tyrol, puis dans la région minière de Carinthie, il prend conscience de l'existence d'une pathologie professionnelle. Il s'adonne malheureusement aussi à la magie et à l'occultisme auxquels il avait été initié par un prieur bénédictin.
Il fut en effet à la fois, un empirique grossier et superstitieux, un alchimiste et un astrologue de place publique, un vagabond mégalomane, colportant des brochures, des bibles et ses portraits, en Autriche, en Allemagne et en Italie où il étudie la médecine et il devient chirurgien militaire à Venise de 1516 à 1524.
En 1525, à Salzbourg, il pratique la médecine avec beaucoup de succès. Sa bonne réputation ne fait que s'accroître lorsqu'il sauve l'éditeur Johannes Froben il obtient alors le poste de médecin municipal et la chaire de médecine de Bâle en 1527.
"Aussi bien à l'aube de cette année 1527, à l'heure où l'Europe est brassée par d'immenses courants intellectuels, où la science et le savoir frémissent sous la poussée de pensées nouvelles qui annoncent les grands moments à venir, aussi bien, dis-je, restant fidèle à ma tradition et aux règles que je me suis tracées, vous n'attendez pas de moi une leçon de conformisme, et vous avez raison." C'est ainsi que Paracelse débutait sa leçon inaugurale à Bâle en 1527 et qu'il concluait par "et maintenant, tous ensemble allons jeter au feu purificateur, les élucubrations livresques de Galien et d'Avicenne."
Mais l'exaltation et l'outrecuidance dont il fait preuve dans sa leçon inaugurale provoquent le scandale. Protégé jusqu'ici par Froben, Paracelse est contraint de quitter la ville à la mort de celui-ci. Il trouve refuge à Colmar et reprend ses pérégrinations à travers toute l'Europe, surtout en Allemagne du sud. Durant ces années d'errance, il étudie les maladies, passe beaucoup de temps avec les paysans afin d'apprendre d'autres façons de soigner. Il écume alors les tavernes, provoquant avec ses compagnons d'un soir des "joutes alcooliques."
La conception élevée qu'il se fait de sa profession le pousse à se dévouer sans compter au chevet de ses malades pendant l'épidémie de peste de 1534 dans le Voralberg et le Tyrol.
Rompant avec la tradition, il enseigne et écrit ses livres en allemand et non en latin et admet dans sa classe des chirurgiens-barbiers. Son oeuvre est un ensemble confus, parfois inintelligible et sur les 99 travaux publiés 50 ans après sa mort, une dizaine tout au plus sont authentiques. Les conceptions théoriques de Paracelse tiennent dans l'histoire de l'évolution médicale une place beaucoup moins importante que les quelques intuitions admirables.
Rejetant ouvertement la tradition galénique, Paracelse récuse la vieille croyance selon laquelle les maladies proviennent d'un déséquilibre dans les humeurs et signale le rôle des facteurs externes. Ses théories constituent un échafaudage surprenant où se combinent la médecine, la philosophie, l'alchimie, l'occultisme et l'astrologie.
Malgré ses erreurs, Paracelse ce bâtisseur d' "entités" cet abstracteur de "quintessences", s'élève au rang des figures originales de l'histoire médicale, notamment lorsqu'il ose proclamer au début du XVI ème siècle: "Bien peu de médecins ont une connaissance exacte des maladies et de leurs causes; mais mes livres ne sont pas écrits comme ceux des autres médecins qui se sont bornés à copier Hippocrate et Galien; je les ai composés en me fondant sur l'expérience qui est la plus grande maîtresse de toutes choses, et au prix d'un labeur inlassable."
Il préconise l'enseignement clinique, déjà en faveur auprès des arabes mais pratiquement ignoré en Europe.
Convaincu de l'importance de l' "alchimie" en pathologie il est le premier à tenter d'établir un système complet.
"L'homme est un composé chimique; les maladies ont pour cause une altération quelconque de ce composé: il faut donc des médicaments chimiques pour combattre les maladies."
Il a introduit la pratique de l'emploi des composés chimiques et a donné d'excellentes notions sur un grand nombre de médicaments: l'opium, le mercure, l'arsenic, le soufre, l'antimoine surtout. A cet égard, Paracelse est donc un précurseur, il est sinon le père, au moins le "grand-père" de la chimiothérapie moderne et de l'homéopathie.
Il développe l'usage des métaux non-toxiques dans les traitements médicaux. C'est ainsi qu'il propose la médication "martiale" contre les anémies en se basant sur des arguments plus astrologiques qu'expérimentaux. Cette théorie eut le mérite de mettre l'accent sur les grands principes régissant le comportement des substances et influença la pratique de la chimie.
Il identifie également la silicose et la tuberculose comme maladies professionnelles chez les mineurs et découvre que la syphilis peut être congénitale.
Enfin, il est un adepte des cures thermales dont il élabore les bases scientifiques.
Il signale sans ambiguïté les propriétés anesthésiques de "l'eau blanche", obtenue en faisant agir de l'acide sulfurique sur de l'alcool. A ce liquide très volatil, l'allemand Froben donnera le nom d'éther. Paracelse précise que ce produit "d'un goût agréable, fait tomber les poulets dans un sommeil profond dont ils s'éveillent sans en subir aucun dommage son emploi est recommandé pour le traitement des maladies douloureuses."
étant donné que Paracelse appartenait à la religion réformée ou sympathisait avec elle, les protestants adoptèrent avec enthousiasme ses théories chimiques, aussi ses disciples vont-ils surtout se rencontrer parmi les maîtres de la faculté de Montpellier et parmi les médecins d'Henri IV.
Son seul mérite est d'avoir donné en tant qu'alchimiste, une certaine impulsion à l'emploi des substances chimiques en thérapeutique. Son renom tient au fait que dans certains passages du Paramirum, il affirme que les semblables guérissent par les semblables et dans les autres cas il conseille l'emploi de doses infinitésimales. Aussi les homéopathes en font un précurseur d'Hahnemann. Ils se sont ainsi rattachés à l'occultisme et à la médecine spagyriste, ce qui leur a nui incontestablement dans les milieux scientifiques.
De retour à Salzbourg, il y meurt le 24 septembre 1541.
Il est regrettable que ses extravagances, ses prétentions, sa violence, ses beuveries, qui par ailleurs ont fait de sa vie un véritable roman, aient jeté une ombre fâcheuse sur le mérite de ce médecin maudit et original.