La Médecine du VIIe siècle av. J.-C. - au IVe siècle après J.-C.

Dès le troisième millénaire avant J-C des pratiques médicales existaient en Mésopotamie et en Egypte notamment , la médecine a réellement été fondée par les Grecs.Elle ne prend toutefois son véritable essor qu'au Ve siècle av. J.-C. avec Hippocrate.

À partir de la deuxième moitié du deuxième siècle avant J-C, la domination romaine sur le monde entraîne les médecins Grecs à venir exercer leur art à Rome.

I
La Médecine en Grèce

Avant Hippocrate

Dans de nombreux domaines, la civilisation grecque est l’héritière lointaine et privilégiée des civilisations orientales.
La médecine de cette époque conserve les caractères de ses aînées orientales: tout se résule en interventions divines et en actions supranaturelles symboliques.

Les divinités douées d’un pouvoir médical étaient nombreuses. Mais Asklépios fut le véritable dieu grec de la médecine.
A partir du VIIIe siècle l’exercice de la médecine cesse d’être le fait de magiciens isolés : il appartient aux prêtres d’Esculape, devenu dieu en Thessalie et en Asie Mineure. L’emplacement de ces temples de diagnostic et de soins était judicieusement choisi dans un climat bienfaisant, souvent à proximité d’une source. A force de voir des malades les Asclépiades apprirent à reconnaître leurs maux et à les soignerpar des moyens qui cessèrent d’être magiques.
Les praticiens resteront groupés par affinité de famille ou de cité, ce qui donnera naissance à autant d’écoles médicales, souvent rivales entre elles et généralement inspirées par une doctrine philosophique déterminée.

Le praticien laïc, moins favorisé que le prêtre médecin , n’en appartenait pas moins à une corporation bien définie, dont les membres étaient liés par un serment déontologique et ffaisaient partie des artisans d’utilité publique ( démiurges). L’exercice de la profession se faisait à domicile ou dans un atelier technique (“iatreion”). D’autres donnaient leurs soins et leur enseignement de façon itinérante, colportant leurs services de ville en ville en fonction de leur goût des voyages ou des offres dont ils étaient l’objet. Aux VIe et Ve siècles, trois écoles médicales fameuses se développèrent dans les cités insulaires ou péninsulaires de la côte méridionale d4asie Mineure : à Rhodes, à Cnide et à Cos.

A partir de 450, Athènes domine la Grèce politiquement et intellectuellement. Les beaux-arts, la philosophie et la réthorique y règent en maîtres. Il est surprenant que la médecine n’ait eu pour ainsi dire aucune place dans la cité de toutes les pensées.

Hippocrate

La naissance d’Hippocrate en 460 avant JC, dans l’île de Cos, fonde
traditionnellement l’émergence de la profession médicale occidentale. La profession se fonde sur le concept de compétence médicale, concept rapportée par Socrate.

Hippocrate se distingue par sa volonté de théoriser la pratique médicale, en établissant des procédures et des règles fondées à partir de l’observation des maladies, de leurs contextes, de leurs évolutions.

Il édicte des principes généraux, sous forme d’aphorismes, à apprendre par cœur par les disciples. Les aphorismes d’Hippocrate seront ainsi appris et transmis jusqu’au XVIIIe siècle et cette méthode d’apprentissage de la médecine, fondée sur des maximes et le par cœur perdurera tout au long de l’histoire du métier de médecin.

La profession médicale s’organise ainsi autour de règles:
- l’obligation morale de la connaissance et de la transmission du savoir,
- l’égalité de la prise en charge des hommes face à la souffrance et à la maladie,
- la défense de la vie,
- la défense du secret professionnel, qui ne constitue par un privilège de la profession, mais un droit fondamental du malade.

L’art d’être médecin est depuis lors guidé par :
- d’une part l’instruction des règles et,
- d’autre part l’expérience personnelle. Cette expérience est décrite comme devant reposer sur l’interrogatoire et l’examen du malade.

La méthode hippocratique est donc une méthode pragmatique qui se distingue alors nettement des méthodes religieuses ou magiques faites d’incantations.

Au moment de la mort d’Hippocrate en 377 environ avant JC, la médecine s’est donnée ses propres repères et éléments de réflexion, indépendant des croyances religieuses. Platon, bien que non médecin, les expose dans ses dialogues ; ils constituent les éléments clefs de l’évolution du métier de médecin. Il s’agit de l’application des quatre éléments naturels au corps humain (déjà évoqué par Hippocrate) :
- la terre, le feu, l’eau et l’air
qui deviennent appliqués à l’homme :
- le sec, le chaud, l’humide et le froid.

De même il expose la théorie des humeurs née sous Hippocrate : le sang, la lymphe ou le phlegme, la bile jaune et la bile noire.
Il conçoit par ailleurs le "pneuma" appartenant à l’air et au feu, et qui caractérise le souffle vital.

Viendra alors Aristote, né en 384 avant JC, qui, bien que philosophe, sera un artisan de l’évolution des concepts liés au métier de médecin. Il œuvre à la continuité de la transmission du savoir fondé sur la raison et l’observation. Ce relais initié à Athènes se concrétise à Alexandrie dans la volonté d’enrichir le corpus médical au sein de la grande bibliothèque. La profession s’organise alors autour de deux groupes :
- d’une par les anatomistes (comme Hérophile né en 330 avant JC qui étudie le système nerveux central et Erasistrate né en 320 avant JC, et qui étudie le sang et affirme qu’il circule des artères vers les veines) et
- d’autre part des physiciens, des pharmacologues, des toxicologues qui concourent à la connaissance des mécanismes du corps, des substances et des plantes.

L’école d’Alexandrie

Vers la fin du IVe siècle av JC, la médecine - au même titre que les autres sciences physiques et naturelles - était en mal d’un nouvel essor.

Plus encore que les autres foyers de culture, la ville neuve qu’Alexandre avait fait bâtir en 331 constituait un centre idéal pour la rénovation des sciences et des arts. Cette période brillante fut malheureusement de courte durée. L’Egypte devenue province romaine, abandonna le flambeau à la capitale latine, avant qu’il revienne à Alexandrie, dans l’Empire d’Orient.

Deux grands noms sont attachés à cette période d’innovation anatomo-physiologique féconde : ceux d’Hérophile et d’Erasistrate qui firent chacun figure de chef d’école. Puis s’en suivit une orientation ayant abouti à la formation de l’école empirique qui se développa largement par la suite. La décadence de l’école d’Alexandrie était consommée et la plupart des médecins de qualité qui se seront instruits à Alexandrie n’y demeureront pas et se sentiront attirés par la toute -puissante capitale des Césars, seule capable désormais de leur offrir une carrière brillante.

II
La médecine romaine

Avant Galien

Dans le monde latin, le moyen de soigner les maladies a été presque exclusivement un art d’importation. Venus pour la plupart d’Asie Mineure ou d’Alexandrie, les praticiens étaient assurés de trouver dans la capitale en plein essor un champ d’action aussi vaste que profitable.

Vers le début du deuxième siècle avant JC, la médecine grecque va gagner Rome. Archagatos serait le premier à s’établir dans la ville, devenant l’ami de Marc Antoine et de Cicéron. Les médecins exerçaient dans le “medicatrina”, avec une compétence variable, la médecine, la chirurgie, la pharmacie. La médecine grecque fut bientôt l’objet d’un véritable engouement. Puis ce fut Asclépiade installé à Rome en 91 avant J-C qui lance l’école de médecine de Rome. On note alors dans l’évolution de la pratique médicale une grande nouveauté : le fait de répertorier les maladies. Puis Soranos d’Ephèse considéré comme le véritable fondateur de la gynécologie, de l’obstétrique et même de la pédiatrie; Pedanius Dioscoride s’est rendu illustre pour avoir composé un vaste traité de pharmacologie; enfin se sont illustrés Archigène d’Apamée et Rufus d’Ephèse. Arétée de Cappadoce dont l’œuvre découverte tardivement, publiée à Bâle en 1567, prenait place parmi celles des “Princes de l’art médical”.

Celse

C’est Celse au premier siècle avant JC, dans son traité « De arte médica » qui présente cette évolution de la profession médicale. Il définit trois classes de pathologies :
- les maladies guéries par simple régime
- les maladies guéries par des médicaments
- les maladies guéries par action chirurgicales.

Il souhaite alors que la profession soit organisée autour de ces compétences :
- la connaissance des maladies et de leur classification
- la connaissance des régimes, des plantes et médicaments, et la chirurgie (qu’il sort dès lors du monde des charlatans et des barbiers).

Au cours du premier siècle après JC, les médecins se réclament tous du courant éclectique, c’est à dire refusant d’appartenir à des sectes ou courant religieux. Ils revendiquent alors ouvertement leur liberté de pensée.

Galien

Galien, né à Pergame en 131, sera l’homme de cette libre pensée et de la médecine du IIe siècle de notre ère. De la médecine antique, il a fait une synthèse générale, lui imprimant une forme personnelle caractérisée davantage par l’autoritarisme que par l’originalité.

Il imprime à la profession médical un concept central, le concept organiciste : “chaque trouble provient de la lésion d’un organe".

Cette approche repose sur le fait qu’il est expérimentateur et étudie (en particulier sur le chien) les conséquences des sections de muscles, des sections de la moelle épinière et la ligature des uretères. Il étudie également le cœur chez le chien et le singe, mais ceci l’induit aussi en erreur en extrapolant à l’homme le fait que les deux ventricules du cœur communiquent (erreur qui sera corrigée par Harvey). Galien signe donc la naissance de l’expérimentation dans les pratiques liées à l’exercice de la profession médicale.

A partir de l’ensemble de ses conceptions anatomo-physiologiques, Galien a édifié une classification physio-pathologique des maladies. La tentative était fort intéressante et trouvera un puissant écho dans la nosologie contemporaine. mais telle qu’elle a été établie par son promoteur, elle ne pouvait avoir de suites fécondes.

Malheureusement, pour reprendre l’expression de Delmas “son rare talent et ses connaissances universelles allaient exercer sur les esprits une influence despotique pendant plus de seize siècles”.

Enfin, on peut également rattacher à Galien les premières actions de santé publique de la profession médicale, puisque Rome et l’empire voient naître sous l’impulsion des médecins la distribution d’eau saine, les égouts et les latrines. On voit aussi émerger les soins pour les pauvres et les valetudinaria, premier établissement de soins urbains pour les vieux et les infirmes, première forme d’hôpital.

Sources

- Bariéty M. , Coury CH. - Histoire de la Médecine. Librairie Arthème Fayard , 1963 pages 67-215