Jacques-Jean-André BAC
1751 - 1794
Jacques-Jean-André Bac est né en 1751, à Saint-Julien-Labrousse en Ardèche.
Il fut nommé curé à Mens, dans le diocèse de Grenoble.
Nous sommes au tout début de la RÉVOILUTION. Le clergé séculier était condamné à devenir civil ; le 12 juillet 1790 la Constitution Civile du Clergé est votée, confirmée par décret du 27 novembre 1790, " enjoignant tout ecclésiastique, fonctionnaire public, de prêter, dans les huit jours, le serment, d'être fidèle à la nation, à la loi et au roi… ". Le 29 novembre 1791, un décret l'Assemblée législative décréta que les réfractaires seraient tenus pour suspects : les persécutions commençaient contre les catholiques fidèles à Rome. Le 27 mai 1792, la législative ordonne la dénaturalisation de tous réfractaires dénoncé par 20 citoyens ou par un seul en "cas de trouble." Le 26 août 1792, les prêtres réfractaires, qu'on peut estimer au nombre 65%, doivent "quitter la France dans le délai de 15 jours."
Avènement de la RÉPUBLIQUE le 21 septembre 1792.
Période de la "TERREUR" entre juin 1793 et thermidor an II (juillet 1794).
Des mesures de répression et de déchristianisation se poursuivent en France avec la fermeture des églises au culte du 31 mai 1793 jusque vers novembre 1794 ; et obligation aux réfractaires de se présenter pour faire la déclaration relative à leur déportation (29/30 vendémiaire an II).
Dans une ambiance à la fois exaltée et inquiète, en plein chamboulement patriotique, en janvier 1791, il signe de bonne foi le serment de la Constitution civile du clergé ; mais y vait mis une réserve préliminaire "qu'il voulait être obéissant à Dieu, et fidèle à la religion." Cette restriction déplut aux administrateurs et Bac fut renvoyé de sa cure en septembre 1791, comme prêtre insermenté. Il revint donc habiter son pays natal, auprès de sa famille ; et crut pouvoir se dipenser d'obéir à la loi de la déportation, prise le 26 août 1792. Pour être tranquille, il fit devant la municipalité de Saint-Julien-Labrousse, le serment de Liberté-Égalité, prescrit par la loi du 14 août 1792, avec des réserves qu'exigeait sa Foi. Il fut donc considéré comme réfractaire. Arrêté en mai 1794, et envoyé prisonnier à Privas devant le tribunal criminel.
Au cours de l'interrogatoire il fit observer qu'il avait fait des réserves à son serment de constitution civile du clergé et que de ce fait il fut dépossédé de sa cure et remplacé. Il en fit de même pour sa prestation de serment de liberté-égalité devant la municipalité de Saint-Julien-Labrousse ; il indiqua enfin n'avoir pas eu connaissance de la loi des 29 et 30 vendémiaire an II (20-21 octobre 1793) qui ordonnait aux prêtres réfractaires de se présenterpour y faire la déclaration relative à leur déportation.
La sentence fut portée contre lui le 26 prairial an II (14 juin 1794) en ces termes :
"Vu l'extrait du procès-verbal des séances du directoire du district de Mezenc, des 24 floréal et 17 prairial courant ; ce dernier portant que Jean-André Bac, prêtre ci-devant curé de Mens, département de l'Isère, habitant actuellement à Saint-Julien-Labrousse, sera traduit au tribunal ; le certificat de la municipalité de Brousseval, ci-devant Saint-Julien-Labrousse, du 25 courant, portant que la loi des 29 et 30 vendémiaire y a été publiée et affichée le 16 nivose dernier : ouï ledit Bac, lequel a déclaré avoir prêté le serment, au mois de janvier 1792, et avoir été déplacé de sa cure au mois de septembre suivant, à cause des restrictions apposées à sondit serment, et qu'il fit les mêmes réserves à celui prescrit par la loi du 14 août 1792.
Considérant que la loi du 9 janvier 1791 ordonne que le serme,t sera prêté purement et simplement, sans que les ecclésiastiquespuissent se permettre aucun préambule, explication ni restriction ; que celle du 26 août 1792 prononce la déportation contre ceux qui, ne l'ayant pas prêté, ne seraient pas sortis, dans quinzaine, du territoire de la république ; que l'aticle X de la loi des 29 et 30 vendémiaire, déclara sujets à la déportation
les évêques, ci-devant archevêques, les curés conservé en fonctions, et ceux qui ont prêché dans quelque église que ce soit, depuis la loi du 5 février 1791, qui n'auraient pas prêté le serment prescrit ; que l'aticle XIV de la même loi leur enjoint de se rendre, dans la décade de la publication, auprès de l'administration de leur département qui prendra les mesures pour leur arrestation, embarquement et déportation ; que ledit Bac n'a point profité de ce délai.
Le tribunal déclare que ledit Bac était sujet à la déportation ; et, faute par lui de s'être présenté, dans le délai prescrit, à l'administration du département, ordonne que ledit Bac sera livré à l'exécuteur des jugements criminets, pour être mis à mort sur la petite place de cette commune (Privas), dans le délai de vingt-quatre heures ; déclare ses biens confisqués au profit de la république, conformément aux articles cités
, et à l'article XVI ; ordonne que le présent jugement sera exécuté à la diligence de l'accusateur public."
Le jugement ne fut, en réalité, exécuté qu'un mois et demi plus tard, soit parce qu'on voulait que la sentence infligé au curé Bac le soit en même temps que celles infligées à d'autres prêtres et religieuses ; soit peut-être que, parmi les juges certains espéraient des circonstances propres à faciliter l'évasion des futures victimes (Bac, d'Allemand, Gardès, Montblanc, Rouville ; et Antoinette Vincent, Madeleine Dumoulin, Marie-Anne Sénovert). Rien de tel ne se produisit ; une ouverture faite dans le mur de leur chambre fut découverte par la femme du concierge qui mit obstacle à ce que leur offrait la Providence !
Ils ne pensèrent plus qu'à se préparer à la mort par des prières. Ils s'encourageaient les uns les autres par des cantiques. En sortant de prison, pour se rendre sur le lieu de l'exécution ils entonnèrent des psaumes jusqu'au pied de l'échafaud. Certains habitants de Privas remplis d'un saisissement religieu, se retirèrent ; tandis que d'autres accouraient pour écouter les chants, retentissant dans la cité, inouïs depuis la révolution.
Le 8 thermidor an II (26 juillet 1794), les trois religieuses furent décapitées avant les quatre prêtres. Leurs corps furent jetés dans une fosse et un hommage leur fut rendu pendant les années qui suivirent.
En 1795 / 1796, les fidèles de Privas et des environs se réunissaient auprès de leur tombe, les dimanches (n'ayant pas d'église) pour y réciter des prières...La chapelle édifiée à la fin du XIXe siècle sur leur sépulture reste encore de nos jours un lieu de dévotion, de ferveur et de grâces, comme en témoignent les ex-votos apposés au mur de la chapelle.
- Les martyrs de la foi pendant la révolution française, par l'abbé Aimé Guillon de Montléon, Germain Mathiot Libraire à Paris, 1821, ( University of Michigan).
- Saints et pieux personnages de l'Ardèche de l'Abbé Mollier, curé de Banne - Livre III, 1895.