Joseph Besset est né le 11 novembre 1890 à Vanosc, petite commune prospère de Haute-Ardèche, à une dizaine de kilomètres d'Annonay, dans une famille de modestes agriculteurs dans laquelle le travail des champs passe souvent avant l'école. Il est l'aîné de la fratrie.
Joseph Besset |
En 1905, à l'âge de 15 ans, il entre en apprentissage chez un charron local, Alphonse Landy, ce qui à l'époque, constituait une promotion. Il y acquiert les compétences du travail du bois et du fer, ainsi que l'exigence du travail bien fait. Il apprend à fabriquer des chars, tombereaux, charrettes, calèches…
Puis en 1908, avec un ami, Marcel Léorat, il part à la découverte pour un tour de France, dans l'esprit des compagnons du devoir. Équipé d'un vélo en bois dont il améliore les roues par un bandage en caoutchouc, il rejoint Paris, puis Rouen et traverse même la Manche pour travailler quelques temps en Angleterre pour y examiner les carrosses royaux.
Il épouse Marie-Augustine Seive le 27 novembre 1913. Il effectue son service militaire au Maro. À son retour il achète un atelier au Prématré à Annonay, peu avant d'être mobilisé pour la guerre de 1914.
Chassis Rolland Pilain carrossé par Besset en 1920 |
En mai 1920, il carrosse sa première voiture. Ses ateliers sont alors répartis en secteurs : forge, menuiserie, tôlerie, peinture, garnissage, sellerie. Cette voiture sera suivie de beaucoup d'autres, sur les châssis des plus prestigieux constructeurs : Rolland-Pilain, Talbot, Voisin, Delahaye, Delage, Berliet, Rochet-Schneider, Bugatti, De Dion Bouton, Voisin ... chacune sur un modèle unique. Avec ses douze ouvriers et ses trois apprentis, il réalise une ossature en bois, fixée sur les longerons du châssis, puis l'habillage et la garniture, sur mesure, selon les choix du client.
Sa production variée connaît un tel succès qu'en 1925 il achète un terrain à la sortie de la ville, près de Ripaille. Il finance sa nouvelle usine en créant la Société Anonyme des Etablissements Besset, en lançant une souscription de 3 000 actions de 500 francs.
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Malgré l'essor de son entreprise, il pressent que la carrosserie personnalisée ne résistera pas face au développement de la fabrication en série et dès 1927 il s'oriente vers celle des autocars. Dans les années 1930, il se consacre à la carrosserie de car, sur des châssis des différentes marques : Renault, Citroën, Panhard, Delahaye, Saurer...
En 1934, toujours à la recherche d'améliorations, il remplace les traditionnelles ossatures bois par des structures métalliques tubullaires, plus légères et plus résistantes aux chocs, en même temps il opte pour la soudure électrique. Il dépose de nombreux brevets de fabrication.
Il est le premier à prendre en compte la nécessité de transporter les personnes différemment des marchandises en se souciant du confort et de l'esthétique.
Autocar Isobloc 1955 |
L' aventure Isobloc (1938-1959) : la dernière restauration (2010) du musée est cet Isobloc 648 DP 103 de 1955, avec moteur diesel Panhard 4HL (6.800 cm3 et 110 CV). Quand la production des Isobloc s'est arrêté en 1959, il avait produit 3 404 autobus.
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En 1937, il part aux États-Unis pour acheter la licence "Gar Wood" et un an plus tard, il lance sur les routes le premier autocar européen sans châssis, le fameux ISOBLOC, autocar à structure autoportante et moteur arrière. En 1938, à la Foire Internationale de Lyon, Joseph Besset présente le premier autocar européen à structure autoportante avec moteur à l'arrière situé en porte-à-faux. L'absence de chassis est une véritable révolution. La technique que ce fils de paysan ardéchois a industrialisée est révolutionnaire... Au XXI° siècle, les cars sont encore fabriqués selon ce principe.
Outre les autocars, il construit des véhicules de pompiers, les "Tubincendie", la petite voiture deux places Coccinelle Sofravel, il restaure des wagons pour la SNCF. Il fabrique même des semelles de bois et des baraques démontables. Il a également créé plusieurs lignes de transport en commun ; ce qui lui permit entre autres, de réutiliser les véhicules qu'il a repris à de bons clients, lors de nouveaux achats. Il lance notamment "les cars rouges" à Saint-Étienne, société vendue plus tard à Madame Granger, la belle-mère de Gaston Chazot dont l'entreprise reprise par ses fils, est devenue dans son secteur d'activité, l'une des principales du Forez.
Visionnaire aussi en matière de communication, il lance des campagnes publicitaires esthétiques et efficaces qui mettent en valeur les qualités de ses véhicules : rapidité, confort, sécurité… Selon son expression, il passe de "la voiture à crottin à la voiture à pétrole". À son apogée en 1947, l'usine d'Annonay sort 10 cars par jour et l'Isobloc est vendu dans plusieurs pays d'Europe, d'Amérique du Sud et d'Afrique.
Pour loger la population ouvrière employée et l'avoir à disposition à proximité du site de production, Joseph Besset s'associe à la construction d'un groupe d'immeubles de la "cité soleil" au quartier des Perrières. Le président de la République Vincent Auriol en personne, accompagné de Messieurs Pineau, ministre des Transports et Eugène Thomas secrétaire d'État aux PTT, viendra poser la première pierre de la cité le 11 juin 1949.
Fin de vie
Mais un brutal retournement du marché et une montée de la concurence, notamment de Chausson qui a développé plus vite la motorisation Diesel et les autocars de plus de 40 places, entraînent une chute des commandes. Malgrè des tentatives de diversification, les difficultés de trésorerie contraignent Joseph Besset à céder son entreprise qui sera alors reprise par son associé, Sylvain Floirat en 1951.
Le 16 août 1951, Joseph Besset se remarie à Paris avec Mademoiselle Andrée-Catherine-Pierrette Gijard. Après quelque temps à Andance, Joseph Besset se retire définitivement à Mèze dans l'Hérault. Son neveu Johanny Desmartin y achète une affaire d'ostréiculture dans laquelle Joseph Besset apporte des améliorations techniques.
Joseph Besset est décédé à Mèze, le 20 août 1959.
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L'atelier de carrosserie qu'il construit à Annonay en 1925, va devenir au fil du temps la SACA, SAVIEM, Renault V.I., Renault Trucks et enfin de nos jours : Irisbus Iveco... Joseph Besset aura fait d'Annonay une des capitales européennes de la construction de cars.
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Un Espace Joseph Besset-Musée du Charronage au car, réparti sur deux sites, retrace cette épopée industrielle : Le site n° 1 au cœur du village de Vanosc, route de Burdignes, où commence la visite, puis le site n° 2, à 900 mètres en direction de Villevocance.
sources
- "Les Hommes dans l'entreprise" par Maurice Balandraud, publié par les carnets de La Vanaude, Vanosc, 2007.
- Le Génie de l'Ardèche" par Jean-Marc Gardès et Annie Sorrel, FOL Éditions, Privas, oct 2007.