Portraits d'ardéchois

Menu

Joseph-Antoine COURBIS


1752 - 1795


Le "Marat du Midi"

Joseph-Antoine Courbis est né à Tournon le 28 janvier 1752. Joseph Courbis, le père de Joseph-Antoine, était marchand, sa mère est Marie Faure.

Comme les enfants de la bourgeoisie locale, l'enfant fait ses études au collège de Tournon puis il va compléter son éducation dans une grande ville (Montpellier ou Toulouse). À trente deux ans, lorsqu'il achète une charge de procureur, il a définitivement quitté le Vivarais de ses origines puisqu'il est avocat au parlement de Toulouse ; et l'année suivante, il s'installera dans une maison attenante au palais de justice de Nîmes (5 mars 1785).

C'est dans le Gard, où il passera le reste de sa vie, que Joseph-Antoine Courbis se livrera "totalement à la Révolution".

Voici un bref aperçu de son engagement dans ce département :

En 1790, il est électeur et membre du club des amis de la Constitution de Nîmes. Ce club est un véritable contre-pouvoir face à la municipalité catholique et contre-révolutionnaire que dirige alors le baron de Marguerittes. Après de nombreuses péripéties, la ville devenant ingérable, le maire est remplacé par une présidence collégiale. À l'issue de nouvelles élections, Joseph-Antoine Courbis est élu officier municipal, le 23 mars 1791.

Le 13 novembre 1791, des artisans nîmois du textile créent, en réaction au triomphe de la bourgeoisie protestante qui a réussi à s'emparer de tous les rouages administratifs locaux, une Société Populaire des amis de la Constitution. Cette Société va se radicaliser et prendre la tête du mouvement démocratique dans le Gard.

Le 5 octobre 1792, Courbis adhère à la Société Populaire mais il devient aussi le porte-parole des jacobins locaux qui l'élisent procureur-syndic du district de Nîmes en novembre 1792.

Société Populaire et club des jacobins entrent alors en conflit en 1793. Courbis tente de s'opposer aux menées contre-révolutionnaires de l'administration départementale comme de la nouvelle municipalité, sans succès.

Fédéralistes, un mouvement bourgeois ; "iIs voulaient conserver les acquis de la Révolution sans pour autant céder davantage au populaire".

Quand la révolte fédéraliste est déclenchée, le 11 juin 1793, Courbis est soupçonné de malversations. Il affiche un nouveau train de vie et possède une magnifique demeure donnant sur l'Esplanade, juste à côté du Palais de justice. Il évitera son arrestation en prenant la fuite. Quelques semaines plus tard, le 29 juillet, avec l'aide d'amis bien placés, il sera réintégré dans ses fonctions.

Puis le 12 septembre 1793, les représentants en mission, Rovère et Poultier, qui se trouvent en Avignon, le désignent comme maire de Nîmes.

Avec la nomination de Joseph-Antoine Courbis, le 2 octobre, à la présidence du Comité de Salut Public du Gard, la terreur va régner à Nîmes. Réintégré dans ses fonctions et responsabilités, Courbis s'appuie sur la Société Populaire de Nîmes pour déployer une activité inlassable et lutter avec la plus grande fermeté contre tous ceux qui transgressent les nouvelles lois. Courbis déploie toute son énergie contre les fédéralistes.

Il fixe ansi le prix du pain à deux sous deux deniers la livre, ce qui évite malgrè la disette, que les plus démunis ne meurent de faim…

Joseph-Antoine Courbis continue à poursuivre de sa rigueur inflexible les anciens fédéralistes. Mais au fur et à mesure que la répression s'accentue, l'opposition contre lui se manifeste au sein même du noyau des durs.

La guillotine étant installée sur l’Esplanade, de la fenêtre du vestiaire des juges, il assistait au spectacle, attablé avec les juges Giret, Béniqué et Raffard. Ils pariaient sur la chute de la tête dans le panier ou hors du panier. Si le condamné raidissait la nuque avant le choc du couperet, sa tête bondissait au lieu de tomber dans le panier…

La plupart des anciens administrateurs du Gard, ainsi que les fédéralistes passeront sous le couperet. La Maison de Justice située derrière le tribunal ainsi que la Citadelle étaient engorgées. On transférait les femmes dans des chars à bœufs jusqu'à la prison de Sommières. Le couvent des Capucins (emplacement de l'actuel hôtel Atria) sera transformé en lieu de détention. Le jugement était sommaire : pas de jury, un seul défenseur et maître Dupuis l'avocat des pauvres. Il n’y avait pas de témoins pour la défense. C'était suicidaire. La condamnation terminée, le bourreau Vachale entraînait les malheureux à pied vers la guillotine située sur l'Esplanade, face à l'actuelle rue Régale.

Nimes Esplanade
1793 : L’Esplanade sera une place importante à l’époque de la terreur. À côté de son emplacement se trouvait le couvent des Capucins. Le Comité de Salut public avec son président Jean Antoine Courbis (maire de Nimes 1793-1794) y fera enfermer des centaines de suspects. Les condamnés se rendaient à pied vers la guillotine (installée sur l'Esplanade) où le bourreau Vachale, les vêtements maculés de sang les attendaient. Courbis assistait aux exécutions avec ses amis les Juges Giret, Béniqué et Raffard. Après la chute de Robespierre, l’ex maire Courbis fut emprisonné à la Citadelle (fort Vauban), la foule exaspérée par la longueur de son procès enfoncera la porte de sa cellule et le massacrera le 4 juin 1795.

 

Le nouveau maire de Nîmes avait pour ennemis les puissantes familles des notables qu'il avait fait enfermer ou condamner. Un rapport accusateur réalisé par MM. Bertrand et Langlois adressé à la Convention de l'Hérault déclenche l'arrestation de Courbis le 10 janvier 1794.

Il évitera la prison en restant en garde à vue dans sa propre demeure. Une délégation du Comité national de Salut Public venue à Nîmes le déclarera innocent le 28 janvier. Ses accusateurs, MM. Bertrand et Langlois seront rapidement guillotinés.

Le 8 ventose an II (11 mars 1794), le député et avocat du Gard Jean-Henri Voullaud, défendra Courbis à la Convention alors que celui-ci sera aux prises avec les fédéralistes et les grandes familles du département du Gard, et qu'il l'appelera le "Marat du Midi".

 

Quelques jours après la chute de Robespierre survenue le 27 juillet 1794, le conseil d'administration du district fait arrêter Courbis en pleine réunion, ainsi que plusieurs membes du tribunal et de la commune. Il sera enfermé dans un cachot de la Maison de justice, transféré à la Citadelle et il sera massacré dans sa cellule par une bande armée qui réussira à s'introduire dans la prison dans la nuit du 4 juin 1795… Aucun témoin ne reconnaîtra les assassins, et les administrations ne mettront aucun empressement à rechercher les coupables.

Voilà quelle fut la triste fin du vivarois Courbis, surnommé le "Marat du Midi", au terme d'une courte vie de 43 ans, entièrement consacrée à la cause de la Révolution.

Sources

- Joseph-Antoine Courbis dit le "Marat du Midi" de Tournon en Vivarais dans "Le saviez-Vous" par Jean-Marc Gardès, ENVOL n° 399, avril 1990, Privas.

- "Les Maires de Nîmes de 1790 à nos jours", éditions www.nemausensis.com, par Georges Mathon, 2008.