Paul Puaux est né à La-Voulte-sur-Rhône, en Ardèche, le 25 août 1920, dans une famille modeste, son père Gaston, blessé pendant la guerre de 1914/1918 était facteur à La Voulte ; il est nommé à Coucouron en 1921/1922. C'est dans ce village de montagne que le jeune Paul fera ses premiers pas. Ses parents sont des républicains convaincus des "rouges" pour les gens du plateau ardéchois. Son père va revenir aux bords du Rhône (Le Pouzin), Paul Puaux va fréquenter l'école publique, s'initier à Zola et Balzac et s'essayer au théâtre. Les parents décident que leur fils sera instituteur. En 1935/1936 il fréquente le cours complémentaire au Pouzin, puis la troisième à l'école primaire supérieure à Valence.
Paul adhère aux Jeunesses Communistes en 1935 ; il sera secrétaire de la cellule du Pouzin, puis du secteur de Privas-Flaviac-Montélimar-Le Teil et Loriol, puis encore membre du comité régional et du bureau Drôme-Ardèche du P.C.F.
Au décès de son père en 1935, sa mère obtient un poste de factrice puis la recette postale de Coux. Paul ne souhaitant pas rester à la charge de sa mère, il se tourne vers un oncle cheminot en Avignon. Là, il passe et réussit le concours d'entrée à l'École Normale en 1936, il a tout juste 16 ans.
Instituteur à 19 ans, il est donc enseignant de formation, de fibre laïque et républicaine et protestant.
Il vit pleinement, dit-il, la période du Front Populaire (1936-1938), fréquente les auberges de jeunesse, les CEMEA (Centres d'Entrainement aux Méthodes d'Éducation Active). Le futur instituteur devient, insensiblement mais sûrement, militant pour la culture et le sport. Paul décroche son Certificat d'Aptitude Pédagogique en 1940 et il est aussitôt nommé sur son premier poste à Sorgues (Vaucluse).
Scout laïque, résistant
Paul Puaux aux Eclaireurs de France |
Entré en relations avec les Éclaireurs de France dès 1939, alors qu'il était élève de l'École Normale, Paul Puaux prend des responsabilités de « chef de troupe » après sa nomination à l'école de Morières au début de la guerre ; « On considérait que faire la classe, c'était instruire certes, mais ce n'était pas suffisant, qu'il y avait à donner un prolongement à notre activité purement professionnelle, et chacun militait, soit dans une organisation périscolaire, comme on disait, la Ligue de l'Enseignement par exemple, soit dans le scoutisme laïque ».
En 1941, il revient dans son Ardèche natale, pour se marier avec Yvonne Roumegoux aux Ollières-sur-Eyrieux. Entre 1941 et 1945, il est en poste à Morières dans le Vaucluse.
Il entre en 1941 dans la résistance comme volontaire et le voilà dans les FFI. Pour échapper au STO (Service du Travail Obligatoire), il se fait mineur de fond dans l’Ardèche en 1943/1944. Puis de retour dans le Vaucluse, à la tête des Éclaireurs de France, il va rencontrer le chef résistant Alexandre, de son vrai nom René Char.
Il accueillle de jeunes juifs menacés par les lois raciales, organise un camp d'aînés à Vars en 1946, prend des responsabilités départementales puis régionales, anime des stages de formation, participe au jamboree de 1955 au Canada etc.
Redevenu instituteur, il est dans l’après-guerre, un militant de la Paix qui entre au Parti Communiste ; candidat de ce parti aux élections législatives de 1958 et 1962, il ne sera pas élu. Cela lui vaudra le retrait de sa délégation au poste d’inspecteur de la Jeunesse et de l’Éducation populaire où Jean Guéhenno l’avait nommé en 1945.
À côté des Éclaireurs de France (E.D.F.), Paul Puaux participe aux CEMEA :
"L'entraînement aux méthodes d'éducation active ne se justifiait que pour déboucher sur l'action, une action importante, indispensable, urgente : les colonies de vacances (…) Comment former dans le minimum de temps l'encadrement élémentaire ? Une invention assez extraordinaire, le stage, nous permit de découvrir concrètement la liaison entre la théorie et la pratique. J'en ai retenu cette nécessité de ne jamais séparer la réflexion de l'action".
À la création des Francs et Franches Camarades, Paul Puaux a accompagné l'évolution des E.D.F. dans leurs prolongements vers l'éducation populaire - et au-delà…
Rencontre de Jean Vilar
En 1947, devenu inspecteur de la Jeunesse, Paul Puaux rencontre Jean Vilar à l’occasion de la première Semaine d’art dramatique d’Avignon ; il reçoit une troupe de comédiens venus de Paris, dirigée par un jeune homme de 35 ans, Jean Vilar, pour faire trois créations théâtrales dans trois lieux différents : la cour d'honneur du Palais des Papes, le verger d'Urbain V et le théâtre municipal. Les trois événements réunissent un peu plus de 4 000 spectateurs.
Paul Puaux ne connaît rien du théâtre et ne sait comment répondre au directeur de cette troupe qui s'adresse à lui pour lui demander : « tu t'occupes de jeunes, eh bien, amène moi des jeunes ! ». Dès lors, il va véritablement commencer le rôle de « relais » qui sera le sien toute sa vie, entre ce public neuf et le théâtre. Il dira lui-même :
" Cette rencontre avec Jean Vilar a changé ma vie. (…) De là s'est développée l'idée de contact plus suivis, plus réguliers, entre le metteur en scène, les comédiens, les artisans et techniciens du spectacle et le public".
Il devint son fidèle ami et le considérait comme son maître. Il s'en fit d'ailleurs le fidèle mémorialiste et poursuivit son œuvre en consacrant sa vie au théâtre populaire, comme on l'appelait alors.
Festival d'Avignon de 1971 à 1979
De 1955 à 1965, le festival d'Avignon était l'affaire exclusive du TNP (Théatre National öpulaire) auquel la ville donnait le festival en concession. À partir de 1966, le régime adopté est celui d'une régie municipale. Le maire passe un contrat avec le directeur artistique (qui est ainsi employé par la ville et dégagé des responsabilités financières) et les compagnies théâtrales.
de gauche à droite : Paul Puaux, Jean Vilar et Maurice Béjart -photo Atzinger |
À partir de 1963, Jean Vilar l’associe à sa réflexion sur l’évolution du festival d’Avignon et en fait son "administrateur permanent" en 1966. Détaché en 1967 de l'Éducation Nationale, il devient « administrateur » du festival… avec un bureau à Paris, au siège national des E.D.F., 66, rue de la Chaussée d'Antin.
En 1971, à la mort de Jean Vilar il continuera d’assumer la responsabilité du Festival. Il devint logiquement, selon ses propres termes, "responsable du festival", même s'il affirmait "on ne succède pas à Jean Vilar".
Il décrit son parcours de militant porté par le scoutisme laïque :
" Mes idées sur l'Éducation Populaire se sont renforcées pendant la Résistance. Ce fleurissement d'organisations culturelles, lié à l'esprit républicain, je le fais remonter à Condorcet, à la fin du XIXe siècle, et au début du XXe avec le Sillon de Marc Sangnier. L'affaire Dreyfus par exemple, qui avait déclenché le mouvement des intellectuels qui allaient au peuple ; les Universités populaires, les Bourses du travail, le Front Populaire de 1936 ; pour tous, la démocratie n'allait pas sans l'instruction, sans la culture… "
Paul Puaux |
En 1979, il décide de mettre fin, après trente trois ans, à l'aventure d'une équipe. Puaux laisse son poste à Bernard Faivre d'Arcier. La même année, il ouvre avec l'Association Jean-Vilar et en collaboration avec le département des Arts du spectacle de la Bibliothèque nationale, la Maison Jean-Vilar où ont été rassemblées les collections concernant la vie et l'œuvre de Jean Vilar. En 1982, avec Melly Puaux, il fonde au sein de l'Association Jean Vilar, "Les Cahiers de la Maison Jean Vilar" devenus "Cahiers Jean Vilar" en 2011.
Sa présidence du conseil d’Administration de l’Opéra de Paris (1981-1983) et son rôle de conseil de Jack Lang en matière d'art lyrique, l’éloignent quelque temps de l'Association Jean Vilar.
Il n'avait jamais voulu d'autre titre que celui de "compagnon de Jean Vilar".
Il continue à être le militant d’une culture populaire, toujours actif, toujours entretenant le rêve d’un monde meilleur et ne se contentant pas de rêver, même si notre fin de siècle considère comme utopie bien des combats qu’il a menés.
Le 12 décembre 1980, il est fait chevalier de l'ordre national du mérite,
Le 12 novembre 1984, Jack Lang lui remet les insignes de chevalier de la légion d'honneur,
Paul Puaux est décédé en Avignon, le 27 décembre 1998. Il fut incinéré à Montpellier.
Sources
- "Paul Puaux, l'homme des fidélités", édité par l'Association Jean Vilar 8, rue de Mons, 84000 Avignon.
- Association pour l'Histoire du Scoutisme laïque : EDF et Centenaire
- "Mort de Paul Puaux" dans l'Humanité.fr par Jean-Pierre Leonardini.
- Le Saviez-vous ? "Paul Puaux l'Ardéchois", article paru dans ENVOL, le journal mensuel de la Fédération des œuvres laïques de l'Ardèche n° 638 mars 2014.