VII
1. La crise de 1929
1- Signes précurseurs de la crise de 1929
L'extraordinaire prospérité économique que connaissent les États-Unis dans les années 1920 est suivie d'une crise brutale et profonde aux conséquences mondiales.
Malgré cette prospérité, le pays se referme sur lui-même. Les barrières douanières protectionnistes sont renforcées (tarif Fordney-McCumber, 1922) tandis que la xénophobie (limitation de l'immigration, activités du Ku Klux Klan) et le mouvement de prohibition se développent.
Vers 1925, développant une production industrielle de masse, les États-Unis fournissent 44% du charbon et 51% de l'acier mondial, grâce à une forte concentration de l'industrie et à de nouvelles méthodes de rendement et d'organisation du travail. La crise est certes brutale dans l'enchaînement des évènements, mais les premiers signes sont antérieurs à 1929.
• Le XXème siècle débute sur une hégémonie américaine, à la suite du soutien logistique et en armement, à la première guerre mondiale, les États-Unis ont assuré la victoire aux Alliés. Les Américains sont confiants et consomment de plus en plus à crédit. Les résultats des entreprises s'envolent. Les titres boursiers montent inexorablement. Certains Américains investissent des milliards de dollars en Bourse, après avoir emprunté aux banques et gagé leur maison
• A la suite du plan Dawes en 1924, l'Allemagne paie bien les réparations de 1925 à 1930, et la France utilise ces sommes pour rembourser les États-Unis. Le plan Young de 1929 détermine les paiements de l'Allemagne désormais échelonnés jusqu'en 1988 ; mais ce projet s'effondre du fait de la crise économique mondiale qui se déclenche le jeudi 24 Octobre 1929 à Wall Street.
• Depuis 1925, la mécanisation de plus en plus forte de l'agriculture, entraîne la réapparition d'une surproduction, qui de plus est concurencée par de nouveaux pays producteurs. Les plus petits agriculteurs américains dont les salaires sont en baisse quittent leurs terres au rythme de 600.000 par an.
• Les banques se sont regroupées en trois grands groupes: Mellon, Morgan, Rockfeller. Cette concentration si elle est une preuve de dynamisme, montre également les faiblesses de l'économie américaine, en effet moins il y a d'établissements bancaires plus le risque est grand d'encourrir des difficultés financières
• A partir de 1925, la production industrielle stagne, si le marché intérieur semble saturé, les exportations permettent aux entreprises de conserver un certain dynamisme. En 1928, l'industrie automobile est en surproduction.
• Dès 1926, la croissance trop rapide de la production, le développement anarchique du crédit, et une confiance excessive dans le libéralisme favorisent une importante spéculation.
• A partir de 1927, les taux d'intérêts montent de 4,06% à 7,6%. Cette hausse s'explique à la fois par la recrudescence des achats à crédit tant pour l'investissement en actions que pour l'achat de biens d'équipement. La seconde cause de cette hausse des taux est l'exportation par les États-Unis d'importantes masses de capitaux à l'étranger.
Même en 1929, après près d'une décennie de croissance économique, plus de la moitié des foyers américains vivent près ou sous le seuil de subsistance : ils sont trop pauvres pour prendre part au grand boom de la consommation des années 20, pour acheter voitures, maisons et autres biens que l'économie industrialisée produisait, trop pauvres même pour se payer nourriture et logement minima. Tant que les entreprises étendent leur arsenal de production (usines, entrepôts, équipements lourds et autres investissements), l'économie est florissante. A la fin des années 20, cependant, les investissements ont créé plus d'espaces de production que nécessaire, et les usines produisent plus que les consommateurs ne peuvent acheter.
L'économie de la nation a commencé à montrer des signes de mauvaise santé plusieurs mois avant octobre 1929. Les stocks de produits de tous types étaient trois fois plus importants qu'une année avant (indication que le public n'achetait pas les produits aussi rapidement que par le passé); d'autres indicateurs - production industrielle, prix du gros, frêt - étaient à la baisse.
Entre 1926 et 1929, les dépenses en construction chutent de 11 milliards de dollars à moins de 9 milliards. Les ventes d'automobiles commencent à chuter plus tard, mais dans les neuf premiers mois de 1929, elles déclinent de plus d'un tiers. Une fois que ces deux industries cruciales commencent à faiblir, les autres secteurs ne sont pas assez forts pour absorber le manque de diversification.
Dans toutes ces industries, la surproduction tire les prix et les profits vers le bas. Les salaires ne montent pas assez vite pour permettre aux consommateurs d'acheter tous les nouveaux logements et produits domestiques disponibles. Le commerce extérieur est restreint par un protectionnisme grandissant dans le monde industrialisé. Le crack boursier retire toute la confiance restant aux consommateurs, et plus important, aux institutions financières. Celles-ci sont extrêmement réticentes à investir. Aussi, l'économie sombre dans une dépression très grave, connue par les Américains comme la "Grande Dépression". Elle est marquée par des niveaux extrêmes de chômage, des investissements négligeables, et des prix et salaires en chute libre.
En réponse à la dépression, le Congrès et l'Administration Hoover déclenchent une politique douanière plutôt isolationniste et par décrets tente de maintenir les prix pour les fermiers, et de lancer un programme de grands travaux publics, pensant que le gouvernement fédéral se devait de maintenir le niveau de l'emploi. Ces efforts sont sans précédents, mais la Dépression en a raison: les indices des prix, profits, production, et chômage empirent.
2- La crise économique de 1929
La surproduction est généralisée. Les stocks constitués incitent certains spéculateurs à prendre leur bénéfice avant une baisse de la bourse.
Beaucoup d'investisseurs ayant acheté leurs titres à crédit, ne peuvent plus rembourser les intérêts qu'ils doivent verser, la hausse des actions devenant inférieure au coût de l'emprunt. Le cycle vicieux est entamé.
Le jeudi 24 octobre 1929, Jeudi Noir ou "Black Thursday" la bourse baisse, 13 millions d'actions sont vendues dans la journée, sans trouver d'acquéreurs. Un nouvel afflux d'ordres de vente trouve son paroxisme le mardi 29 octobre. Alors que les séances précédentes ont été relativement calmes, les volumes du 29 Octobre touchent un nouveau plus haut avec 16 millions de titres échangés.
Pour tenter de freiner la chute de la bourse de Wall Street, les grandes banques dirigées par Morgan rachètent toutes les actions en circulation. La bourse se redresse mais s'effondre de nouveau quand les banques essaient à leur tour de revendre ces actions. Leur situation financière devient très difficile surtout lorsque les particuliers décident de retirer leurs dépôts en banques. Certains établissements bancaires font faillite.
Au 1er Janvier 1930, les principales valeurs ont perdu 25% de leur valeur. Des titres comme Du Pont de Nemours ont abandonné 90% de leurs valeurs, 96% pour Daimler Chrysler.
Pour écouler leurs stocks, de nombreuses entreprises baissent leurs prix, ce qui entraîne une baisse des salaires et une réduction du pouvoir d'achat. La plupart des entreprises qui vivaient à crédit se retrouvent dans l'incapacité de rembourser leurs emprunts, et sont obligées de fermer.
Cette situation provoque une croissance rapide du chômage (3 millions de chômeurs en 1929, 13 millions de personnes en 1932 - 25% de la population active - se retrouvent au chômage dans une situation misérable, s'entassant dans des bidonvilles qui par dérision ont été surnommés "Hoovervilles"), les fermiers s'endettaient et les salaires baissaient, tout comme le nombre de mariages et de naissances.
Des chefs d'entreprises , des banquiers, des particuliers sont ruinés. Désespérés certains se suicideront en se jetant du haut des gratte-ciel de Manhattan.
Avec des millions de sans-emploi, l'agitation politique et le mécontentement ont beaucoup augmenté dans les classes travailleuses. L'administration républicaine alors au pouvoir, dirigée par le bon technicien qu'est le président Herbert C. Hoover, prend des mesures d'urgence, parfois en usant de la répression, tout en demeurant persuadée que "la prospérité est au coin de la rue", c'est-à-dire que les affaires reprendront d'elles-mêmes comme dans les crises précédentes.
Les Républicains au pouvoir entre 1920 et 1932 vont être rendus responsables de la crise, et lors des élections présidentielles de 1932 ils sont balayés par le candidat démocrate, Franklin Delano Roosevelt.
Lorsqu'en novembre 1932, Roosevelt fut élu président, avec 22 millions de voix (contre 15 millions pour Hoover, le candidat républicain), les États-Unis étaient plongés dans une période de profonde récession, la Grande Dépression.
"This great Nation will endure as it has endured, will revive and will prosper. So, first of all, let me assert my firm belief that the only thing we have to fear is fear itself." FDR in his first Inaugural Address at the height of the Great Depression.
"Cette grande nation supportera comme elle a supporté, rétablira et prospérera. Ainsi, tout d'abord, laissez-moi affirmer ma croyance ferme que la seule chose que nous devons craindre est la crainte elle-même." FDR dans son premier discours inaugural au sommet de la grande dépression.
Mais la surproduction et la spéculation entraînent Wall Street, dans un Krach boursier et une crise économique qui se propage ensuite dans le monde entier. C'est le début de la " Grande Dépression ".